EDITO DE RENTREE
-Des feuilletons de l’été à la réalité de la rentrée…pour tous ceux qui n’ont pas été déconnectés …
Ainsi donc nous avons passé l’été à discuter surtout J.O, pokémons, burkinis.
La question de savoir comment préserver le vivre ensemble, sur les plages et ailleurs, au moment où l’Etat islamique multiplie les attentats en France et dans le monde, est évidemment très sérieuse. On n’aurait cependant jamais cru qu’une tenue de bain ferait autant de vagues.
La question des corps sportifs, dénudés ou vêtus, sexués des hommes et des femmes est possiblement porteuse de répercussions dans une école qui se veut égalitaire, fraternelle, garante des libertés. et plus particulièrement dans le champ de l’EPS. Un certain nombre d’idéaux sont percutés par le feuilleton estival à commencer par la laïcité, cette belle spécificité de la pensée et de la législation française!
Refusant toute supériorité à une morale, à une croyance ou à une incroyance particulières, elle leur refuse tout moyen de prosélytisme auprès des populations vulnérables, à l’école et à l’hôpital, par exemple. Garante de la liberté des cultes et des pratiques individuelles, elle prévient toute discrimination envers certaines au profit d’autres.
Ensuite l’égalité à travers son combat pour la dignité des femmes, quel beau combat ! Il reste plus nécessaire que jamais, car le corps des femmes, comme dans tout conflit, est le terrain où les hommes mènent leurs guerres. Ce sont des femmes uniquement qui sont verbalisées ici, jamais ceux qui les ont enfermées dans ces prisons de tissus. Ce débat à la fois symbolique, idéologique et politique n’est pas fait au nom de l’islam, ni même d’une prétendue réappropriation identitaire.
Prenons garde: tout ce qui pourrait être perçu, d’une façon ou d’une autre, comme une stigmatisation des musulmans ne saurait être la bonne réponse, puisque c’est exactement celle qu’espèrent les terroristes : mettre en graine les ferments d’une guerre civile, voire de « civilisation ». Refusons une réponse simpliste et à l’instar d’Edgar Morin rappelons qu’une pensée non complexe est force de destruction.
Quant à Malcom X ne disait -il pas: »si vous n’êtes pas vigilants, les médias arriveront à vous faire détester les opprimés et aimer ceux qui les oppriment ».
D’autres événements d’importance se sont déroulés. De nombreux épisodes probablement liés au dérèglement climatiques ont eu lieu: inondations au printemps en Belgique, en France, en été en Louisiane et une grande partie de la Chine , inondations et incendie aux Etats Unis…
Cet été, le jour du dépassement des ressources renouvelables de la terre en une année a encore avancé. Dans le même temps, on apprend que la production de blé a chuté de 30%, que Lactalis achète le lait an dessous des coûts de production….que le nombre de SDF a augmenté de 50% en 3 ans, qu’au 1er semestre 2016,il y a au 200000 ruptures conventionnelles soit + 13% par rapport à 2015. (elle est où la fameuse rigidité du marché qui nous amené la loi travail?) que la France est championne d’Europe du versement de dividendes (35 milliards d’euros ont été versés dans notre pays aux actionnaires au seul deuxième trimestre 2016). Entre janvier et juillet 2016, les seules entreprises du CAC40 ont accumulé 40 milliards d’euros de profits. En hausse de 4% par rapport à 2015 !
Alors oui ça va mieux ,mais pour qui?
Quelles propositions de réponses, ces questions, avec celles du chômage et des salaires vont elles trouver auprès de nos représentants politiques? L’enfermement dans un débat centré sur l’identitaire et le sécuritaire ou la volonté de voir émerger une société plus juste, plus respectueuse de l’homme et de la nature?
Quels projets seront portés, quelle vision de l’école et de l’EPS vont être défendues en cette année d’élections législative et présidentielle, alors même que des discours sur une alternative scolaire hors de l’Education nationale se développent: il ne serait plus possible de faire évoluer l’éducation dans son carcan institutionnel. De Montessori aux écoles privées, cultuelles ou d’entreprise, les discours oscillent entre une mouvance plus libertaire ,une vision parfois parfaitement rétrograde ou bien encore extrêmement libérale de l’école, jusqu’à certaines formations des enseignants faites par alternance à Créteil et assurées par des sociétés privées. Pour nous, l’Ecole reste l’endroit où nous développons le savoir vivre ensemble ,où nous luttons contre les inégalités. Notre discipline et le sport scolaire , sans vouloir les réduire à cette seule dimension, en sont une bonne illustration.
De nombreux enseignants luttent au quotidien pour leurs élèves et développent des initiatives.
Pour cela, nul besoin d’une réforme du collège mal ficelée et appliquée sans discernement dont les seuls effets prévisibles seront le creusement des inégalités.
Il ne faut pas être dupe : avec des programmes scolaires allégés et une EPS que certains voudraient réduire au rôle de « support à EPI », ce sont les élèves les plus fragiles qui paieront les effets de cette réforme. Pour Anne Barrère « les réformes apparaissent comme de nouveaux problème à affronter, de nouvelles tâches à investir, qui prennent du temps, de l’énergie n’ayant parfois pas d’autre sens que l’obéissance à la prescription ». Pour elle, le changement se fait aussi par la bande, de façon invisible « dans un paradoxal demi silence »…
Nous vous invitons à débattre et à faire vivre ces problématiques au cours de cette année scolaire en participant notamment aux deux temps forts que seront notre AG de rentrée et notre congrès académique….Congrès qui verra le bureau se renouveler.
Catherine Duriez, secrétaire académique